Critique : Favelas

De Stephen Daldry avec Wagner Moura, Selton Mello et Rooney Mara

La note des Cinévores : 1étoile

Rio de Janeiro. Dans les bidonvilles, loin de Copacabana et ses lumières, courent des enfants désœuvrés et déguenillés. Sur leurs visages lumineux, on peut lire en lettres de suie et de boue un dénuement extrême. Normal direz-vous, puisqu’ils travaillent à la décharge du coin. Là, aux côtés d’autres catadores (ceux qui ont vu le documentaire Waste Land savent), ils respirent à longueur de journée la pestilence du monde. Surtout celui des riches, ces piranhas du gaspillage. D’ailleurs, un matin, Rato découvre dans le tas un portefeuille bien garni et met rapidement son ami Rafael au parfum. L’histoire aurait pu s’arrêter là si le butin ne contenait pas un document important pouvant faire tomber des têtes jusqu’aux plus hautes sphères de la société brésilienne. Si l’action du roman d’Andy Mulligan, dont est tiré Favelas, se déroulait dans une contrée imaginaire, le cinéaste Stephen Daldry a opté pour le pays de la samba, du football et du rythme. Après Billy Elliott et Extrêmement fort et incroyablement près, l’intéressé renoue avec une thématique qu’il affectionne : l’enfance. Ici encore, il nous fait découvrir le monde à travers cet angle pour mieux nous faire culpabiliser. D’accord, ses jeunes acteurs amateurs ont la bouille de l’emploi et assez d’éclat pour susciter notre intérêt, mais le traitement proposé frôle le foutage de gueule. Puisant (probablement) son inspiration dans le kaléidoscopique Slumdog Millionaire, Daldry entend, à l’instar de Danny Boyle, faire son film de citoyen du monde (avec option montage serré). Pour cela, il se pose en vengeur providentiel des laissés-pour-compte. Manichéenne jusqu’à la crampe intestinale, sa peinture de la société brésilienne est criarde. Chaque composante a la texture épaisse du cliché le plus débilitant : les enfants opprimés qui incarnent la générosité et par qui le changement arrive, les méchants flics de mèche avec les politiques véreux qui enrayent toute évolution sociétale et la religion, témoin impuissant mais volontaire de ce bras de fer. Quand bien même notre chevalier blanc montre ses augustes intentions fédératives, son scénario crétin et sa mise en scène appuyée ne laissent aucune place à la réflexion pour le pauvre spectateur. Et, sérieusement, qu’y a-t-il de plus désagréable qu’un film qui vous oblige, à coups de plans moralisateurs, à penser comme son créateur ? (Même quand ce dernier a raison).

Mehdi Omaïs