Critique : Mars et Avril

avrilDe Martin Villeneuve avec Jacques Languirand, Caroline Dhavernas et Paul Ahmarani

La note des Cinévores : 2etoiles

Pour son premier long métrage, Martin Villeneuve, le petit frère d’un certain Denis (Incendies, Prisoners), adapte son propre photo-roman, publié dès 2002 aux éditions québécoises La Pastèque. L’occasion de donner chair, dans un Montréal futuriste, à une histoire d’amour sidéral entre un musicien septuagénaire de génie (Jacques Languirand) et une jeune photographe du nom d’Avril (Caroline Dhavernas). On aurait tant voulu aimer cette fresque de SF bizarroïde à l’audacieuse inventivité et aux images parfois saisissantes – une véritable prouesse au regard du modeste budget de l’entreprise. Malheureusement, une contrariante frustration persiste et signe devant ce magnifique mais bien vain objet filmique. On en ressort presque agacé par l’immense potentiel entraperçu de son metteur en scène. Force est de constater, en effet, que Mars & Avril esquisse plus qu’il n’incarne lorsqu’il se veut charnel et sonne paradoxalement creux quand il entonne sa déclaration d’amour à la musique. Pourtant, les intuitions cinématographiques sont là (le corps vu comme un univers inexploré, l’univers comme un corps exploré), et les réflexions artistiques touchent juste (chaque instrument, chaque film, est une création unique, le cinéma est un artisanat). Mais elles restent désespérément à l’état de concepts désincarnés, plombés en outre par un rythme anesthésiant. Martin Villeneuve a tout (l’imagination, l’audace, l’œil, la volonté de mettre l’émotion au cœur de son œuvre…). Il s’agit là d’un cinéaste à suivre, vraiment, à condition qu’il s’affranchisse d’urgence de ses scories de metteur en scène pour mieux soigner le fond… On y croit.

Thomas Destouches